Rencontre avec une traductrice : Ayame

Depuis plus de deux mois maintenant, vous avez pu lire sur ce blog plusieurs articles sur la traduction de fanfiction. Pour conclure cette série, nous avons voulu poser quelques questions directement à une concernée : une traductrice.

Plan de la série

1. Traduire une fanfiction : les motivations
2. Les pièges de la traduction : c’est pas qu’une histoire de mots
3. Bien choisir la fic à traduire
4. Relations avec les auteurs…
5. Reviewer une traduction
6. Rencontre avec quelques traductrices

 

Ayame, que les lecteurs d’HPF connaissent plutôt sous le nom de Jukava, est modératrice sur Harry Potter Fanfiction et a un certain nombre de fanfictions à son actif. Elle a notamment beaucoup écrit sur Sirius Black, et se définit dans sa bannière d’auteure comme une « Black at heart« .

Mais Ayame/Jukava est aussi une traductrice. Sur HPF, elle a publié 19 textes « qui ne [lui] appartiennent pas, qu'[elle] n'[a] fait que traduire » comme elle l’explique en exergue de sa série « Lost in Translation ». Voici son témoignage sur la traduction de fanfiction.

Avatar
Ayame, traductrice, auteure et modératrice sur HPFanfiction.

Quelles sont tes principales motivations quand tu commences à traduire une fanfiction ?

J’ai traduit 19 fanfictions, et c’était toujours pour la même raison : juste faire partager quelque chose que j’ai aimé. Il y a eu des coups de coeur, et puis un certain nombres de textes d’auteurs en particulier. Ainsi, j’ai traduit beaucoup de fanfictions écrites par Callisto Kerrigan et Pelespen. Elle n’étaient pas forcément connues, et j’ai voulu leur faire de la pub sur HPF.

Quels ont été les retours sur tes traductions ?

Il y a plusieurs sortes de réactions. Il y a ceux et celles qui sont arrivés là par hasard et ne comprennent pas qu’il s’agit d’une traduction, et qui me font des remarques sur le fond, l’histoire… Ce sont souvent des textes inhabituels, avec des pairings peu connus. D’autres me disent que c’est bien écrit. Et puis j’ai aussi des remarques sur la traduction, des tournures anglaises qui se voient trop par exemple. Grâce à ces commentaires-là, j’ai repris certains textes en essayant de les dés-angliciser. Certain-e-s de mes reviewers étaient arrivés là parce qu’ils ou elles avaient lu mes fanfictions. Et du coup j’ai eu « On reconnaît tes goûts, mais on voit que ce n’est pas de toi. »

Et tu as rencontré des difficultés en traduisant ?

La principale difficulté, c’est les tournures idiomatiques. Par exemple, une fois, il y avait une phrase, en la traduisant littéralement ça donnait « On essayait de rassembler des nuages errants« . Il y a aussi des styles d’écriture qui marchent bien en anglais, mais beaucoup moins en français. Pelespen, par exemple, écrit en anglais des phrases très longues et avec beaucoup d’adjectifs : ça fait des phrases lourdes en français. Donc il faut trouver un moyen de le rendre plus lisible, mais sans en enlever non plus, sinon on perd la « substantifique moelle ».

Les lemon*, c’est plus compliqué aussi. Il y a beaucoup plus de synonymes pour les termes érotiques en anglais qu’en français. Du coup je tourne en rond, je paraphrase en français. D’ailleurs, j’ai commencé par des fanfictions sans lemon et j’ai bien fait.

Des nuages errants © http://salzikomz.unblog.fr
Des nuages errants © http://salzikomz.unblog.fr

Ça te prend combien de temps pour traduire un texte ?

C’est plutôt long. Moins que certaines fanfictions que j’ai écrites, mais parfois plus compliqué. Je passais cinq heures sur un OS en moyenne. Ma plus longue traduction faisait 37 000 mots, elle a bien sûr nécessité bien plus de temps.

Quelle relation tu avais avec les auteures que tu as traduites ?

Elles faisaient partie de la même communauté LiveJournal que moi, on avait des relations cordiales. Après la publication, je traduisais les reviews que je recevais et je leur faisais parvenir, j’avais une bonne relation avec elles. Pelespen a dit que j’avais le droit de traduire n’importe lequel de ses textes. Et puis un jour j’ai eu une Sélection du mois sur une de ses traductions et je l’en ai informée, elle a beaucoup apprécié.

Bannière de « Silent Speaks », Sélection Hermione Granger de Septembre 2011 © CallistoKerrigan avec des photos de Kerri Russel et Gary Oldman.

Et c’est déjà arrivé que l’auteur-e originel-le refuse que tu traduise son texte ?

Je n’ai jamais eu de refus. Il y avait bien une auteure, mais elle refuse par principe d’être traduite. La fanfiction, c’est un jardin secret… Bizarrement, j’ai eu plusieurs propositions de traduction, je les ai toujours refusées. J’ai été beaucoup plagiée, et j’ai peur que mes textes m’échappent.

Pour finir, quels conseils donnerais-tu à quelqu’un qui veut se lancer dans la traduction de fanfiction ?

Il faut y aller au coup de coeur. Et commencer par quelque chose de pas trop long. 2000 mots, c’est bien pour débuter.

Bannière de Jukava sur HPF © CallistoKerrigan

Ayame est aujourd’hui moins active, comme auteure et comme traductrice. Elle a participé à plusieurs projets d’écriture sur HPF, comme « A Vos Claviers » l’été dernier. Mais il y a apparemment toujours une traduction en cours, donc surveillez vos notifications 😉

* Lemon : en fanfiction, ce terme désigne une scène sexuelle explicite.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.